Michel Legrand et le cinéma (Paris, 2009)

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MICHEL LEGRAND ミシェル・ルグランAND THE CINÉMA Salle Pleyel, Paris, 2009 Avec l’Orchestre National d’Ile-de-France

Legrand’s sheet music (partitions) is available in our Library.

Le meilleur des 50 ans de musique de film de Michel Legrand : Yentl, Les Parapluies de Cherbourg, L’Affaire Thomas Crown, Un été 42, Les Demoiselles de Rochefort, Les Trois Mousquetaires, Brian’s Song, The Happy Ending … / Enregistré à la Salle Pleyel 2009, Paris

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It is difficult to pin the multi-talented Michel Legrand down into one single category. This amazingly versatile singer, songwriter, composer, arranger, conductor and producer has enjoyed a whirlwind career, excelling in an impressively broad range of domains from film soundtracks and French ‚chanson‘ to jazz and classical music.

An international star, who has won as much respect in the United States as he has in Europe, Legrand is an insatiable musician whose creativity and ambition appear to know no bounds. “Melody is the mistress of music”, he is fond of saying. Accompanied by the Orchestre National d’Île-de-France, Michel Legrand is going to prove it again tonight by giving us the pleasure of rediscovering, in their symphonic dress, his most beautiful film scores. And all of this together with the Quebec star Mario Pelchat and the kind participation of some of the big names in French song: Maurane, Liane Foly, Patrick Fiori and many surprise guests.

For the programme for this evening, the composer has compiled a sumptuous panoramic traveling view, spanning over fi fty years of “Legrandish” cinema, as the Americans like to say. Namely, an anthology of vibrant music written for The Umbrellas of Cherbourg, The Young Girls of Rochefort, Yentl and Ice Station Zebra. That’s not all. As the icing on the birthday cake, the maestro will provide us with a bunch of his most famous songs like Summer ‘42, The Windmills of my Heart and How long to die my Youth. A title that looks very much like a profession of faith.

Nous sommes dans un concert de jazz, pas à la messe, dira plaisamment un spectateur à l’entracte, à l’attention d’un voisin mécontent des habituels applaudissements qui ponctuent les solos du London Jazz Band Orchestra. Ces excellents musiciens accompagnent Michel Legrand dans sa  tournée mondiale, nous dit le programme, tournée qui débute ce soir avec cette soirée de gala Legrand jazz (Le Grand jazz?). Soirée d’anniversaire, aussi. Le maestro a fêté ses 77 ans il y a trois jours, et il en profite pour fêter également, avec nous, ses cinquante ans de carrière. Une carrière  de compositeur, de pianiste et de chanteur, une immense carrière de musicien touche-à-tout.

Quand Michel Legrand nous concocte un concert de jazz uniquement avec les arrangements et orchestration de ses œuvres, concert qui durera près de trois heures (vous n’êtes pas pressés? On est bien partis, là, on s’amuse tellement !), on a tout simplement l’impression de revisiter le répertoire universel des standards du jazz, de feuilleter le Song book des jazzmen du monde entier. Il est vrai que ce diable d’homme a vécu plusieurs vies avec des journées de travail bien remplies – « je passe trois heures à composer une musique de film, je joue du piano pendant deux heures, je termine en chanson« . Voilà un travail qui conserve bien son homme !

« Sur l’écran noir de mes nuits blanches, moi je me fais du cinéma », chantait Claude nougaro en 1962 dans son premier 33 tours sur une musique signée Michel Legrand. Voilà plus de cinquante ans que Michel se fait du cinéma. Pour notre plus grand bonheur. Le cinéma de Michel Legrand, ce sont désormais des images inoubliables gravées en nous : Catherine deneuve sur le quai de la gare de Cherbourg ou dansant sur la place de rochefort avec sa sœur Catherine dorléac, Steve McQueen en gentleman cambrioleur dans L’Affaire Thomas Crown, romy Schneider et Alain delon sur les bords de La Piscine. La liste est longue.

C’est en 1955 qu’il compose sa première musique de long-métrage, Les Amants du Tagede Henri Verneuil, sous le nom de Lucien Legrand. Mais c’est le mouvement de la nouvelle Vague qui va bientôt le hisser sur les cimes de la reconnaissance. François reichenbach (L’Amérique insolite), Chris Marker, Agnès Varda (Cléo de 5 à 7 où il interprète le rôle de Bob) ou Jean-Luc Godard (pour qui il écrit sept scores dont Une femme est une femmeet Vivre sa vie) font à jamais partie de sa première famille de cinéma. « Ils voulaient tous changer le cinéma et travailler avec de nouveaux musiciens. Avec eux, l’imagination était au pouvoir. » La rencontre décisive avec celui qu’il appela son « frère jumeau » fut bien sûr celle de Jacques demy. Quincy Jones ayant au dernier moment déclaré forfait, demy demanda à Legrand de lui écrire en catastrophe la musique de Lola (1961).

On connaît la suite de cette collaboration exemplaire : dix films ensemble dont Les Parapluies de Cherbourg (1964) qui révolutionna totalement la comédie musicale et remporta la Palme d’or à Cannes, jusqu’à Trois places pour le 26 (1988) avec Yves Montand.En 1966, avec toute sa famille, Legrand prend la route de Hollywood, comme Maurice Jarre et, plus tard, Georges delerue. Chaperonné par Henry Mancini, il compose en 1968 la musique de L’Affaire Thomas Crown.« Pour le montage, j’ai proposé à Norman Jewison de se baser sur la musique que j’avais écrite. Le film sera entièrement construit sur l’articulation musicale que j’avais suggérée. » Premier triomphe qui lui vaut un Oscar pour la meilleure chanson originale de film (Les Moulins de mon cœur).

Il regagnera la statuette deux ans plus tard pour la musique de L’été 42. résultat : aujourd’hui, avec plus de 200 musiques de film à son actif, son palmarès cinématographique s’affirme très impressionnant et impose désormais sa « french touch » sur tous les écrans du monde.« La bonne musique de film, c’est celle qu’on n’entend pas ». Michel Legrand s’insurge contre cette formule rabâchée par trop de critiques. Sa riposte est cinglante. « Si la musique de film ne s’entend pas, c’est qu’il ne fallait pas la mettre. Il faut qu’elle s’impose par sa seule présence. À mon sens, la bonne musique de film doit autant servir le film que la musique. »

Tel est son credo. « Un compositeur pour l’image, confie-t-il à Stéphane Lerouge, concepteur de l’anthologie Le cinéma de Michel Legrand (4 Cd Universal Jazz),doit être une plaque photographique. Je conçois d’abord la musique de film comme un second dialogue. Elle doit influer sur la direction émotionnelle de chaque scène et parler à l’inconscient du spectateur pour faire remonter à la surface de l’image des sentiments enfouis, cachés. Ma mission principale est de faire « voir » ce qui n’a pas été tourné. »Le propre d’un compositeur pour l’image est selon lui tout simple : s’adapter à toutes les formes et grammaires cinématographiques. « D’un film à l’autre, comme un comédien, je change de personnage et de costume. »

On comprend que la qualité principale que requiert l’écriture de musiques de film soit pour lui l’éclectisme. Ce qu’il aime d’abord dans son travail pour le cinéma, c’est sa variété permanente. Il doit trouver, mieux « entendre » ce que le film réclame comme environnement musical. d’où la nécessité de connaître tous les styles d’écriture. « Un jour j’écris du jazz, puis un air romantique, le lendemain un scoreclassique, puis de la musique élisabéthaine, puis du baroque. Chaque film est une nouvelle aventure et demande sa propre musique. »Quelle est sa méthode d’écriture ? Il part d’abord du film, sans idée préconçue, sans règle préétablie. Il ne peut pas écrire la musique d’un film avant qu’il ne soit réalisé.

Le montage doit être très avancé avant qu’il se mette à sa table d’écriture. «Je vois d’abord le film dans son ordre chronologique pour mieux suivre la progression de l’œuvre. C’est lui qui me parle, comme les visages, les émotions, les mouvements. Puis, je l’emporte chez moi. Je vis jour et nuit avec lui. Je le regarde en long et en large, en avant et en arrière, scène par scène. C’est une activité solitaire, un long travail d’artisan qui exige la concision. Le vrai travail de compositeur quand il s’agit de « musiquer » une scène, c’est dire en une minute et trente-deux secondes, pas plus, ce qu’on aurait aimé exprimer en plus de cinq minutes. »

Telle est l’impitoyable règle du jeu. Avec un sens mélodique et harmonique en tout point exceptionnel comme fil rouge pour relier l’écriture de toutes ses partitions chatoyantes, enveloppantes, toujours entêtantes.« La mélodie est la maîtresse de la musique », aime-t-il répéter. Accompagné de l’Orchestre national d’Île-de-France, Michel Legrand le prouvera une nouvelle fois ce soir en nous offrant le plaisir de redécouvrir en habit symphonique ses plus belles musiques de films. Avec la vedette québécoise Mario Pelchat et l’aimable participation de grands noms de la chanson française : Maurane, Liane Foly, Patrick Fiori et de nombreux invités surprise. Au programme de cette soirée, le compositeur a imaginé un somptueux travelling panoramique sur cinquante ans de cinéma « legrandish », comme disent les Américains.

À savoir, un florilège des vibrantes musiques écrites pour Les Parapluies de Cherbourg, Les Demoiselles de Rochefort, Yentl, Ice Station Zebra et La Piscine. Ce n’est pas tout. Cerise sur ce gâteau d’anniversaire, le maestro nous offrira également un bouquet de ses plus célèbres chansons comme L’été 42, Les Moulins de mon cœur et Quelleest longue à mourir ma jeunesse. Un titre qui ressemble fort à une profession de foi.

Michel Legrand ou la musique au pluriel

« Depuis mon plus jeune âge, ma seule ambition a été de vivre complètement entouré de musique. Mon rêve, c’est de ne rien omettre, c’est pour cela que je ne m’en suis pas tenu à une seule discipline musicale. J’adore jouer, diriger, chanter et écrire, et ce dans tous les styles. Alors je touche à tout et pas juste à un petit peu de tout. Au contraire, je fais toutes ces activités en même temps, sincèrement et en m’investissant complètement. »C’est ainsi que Michel Legrand décrit son statut de musicien atypique, compulsif, qu’il est impossible de cataloguer ou, du moins, ses multiples statuts de compositeur, chef d’orchestre, pianiste, chanteur, auteur et producteur.

En faisant tomber les barrières qui séparent le jazz de la musique classique et de la chanson populaire, il se sent à l’aise dans tous les styles musicaux. né en 1932, Michel Legrand a hérité de la tradition familiale musicale représentée par son père raymond Legrand et son oncle Jacques Hélian. À l’âge de dix ans, il est entré au Conservatoire de Paris, une expérience qui s’est avérée être une révélation inattendue : « jusque-là, j’avais eu une enfance triste et sans remous », dit-il. « Ma vie tournait autour d’un vieux piano et je m’ennuyais beaucoup. Je me sentais très seul. Tout à coup, lorsque j’ai commencé à suivre le cours de Lucette Descaves sur la théorie de la musique, j’ai découvert un monde qui m’appartenait, des gens qui parlaient ma langue.

À partir de là, j’ai senti que la vie allait m’apporter quelque chose de passionnant et de motivant. »Après plusieurs années d’études d’une discipline de fer auprès de nadia Boulanger, Henri Challan et noël Gallon, Michel Legrand remporte les premiers prix du Conservatoire en harmonie, piano, fugue et contrepoint. Il s’est mis à graviter immédiatement autour du monde de la chanson, il a travaillé comme accompagnateur et directeur musical pour Maurice Chevalier, il a accompagné le fameux chanteur français dans ses tournées internationales – ce qui lui a donné l’occasion de visiter les États-unis pour la première fois. Son album instrumental I Love Paris, classé en tête des ventes d’albums aux États-Unis en 1954, a connu un véritable succès dans ce pays. Son premier album avait également une valeur symbolique importante, révélant son potentiel international : le jeune talent de vingt-deux ans ne regardait pas en arrière et il a bâti une carrière de plus en plus solide en France et à l’étranger.dans les années 1950, Michel Legrand a également commencé à composer pour certains artistes qu’il accompagnait.

Sa première chanson, La Valse des lilas, démontrait un style personnel et une écriture mélodique qui eurent tôt fait de devenir sa marque de fabrique ; « j’ai une foi énorme dans la mélodie », admet-il. « Nadia Boulanger a toujours dit : « Mettez ce que voulez au-dessus et en dessous de la mélodie, mais quoiqu’il en soit, c’est la mélodie qui compte. » Par exemple, la musique moderne a tendance à m’ennuyer à présent. Évidemment, elle comporte des rythmes innovants et différents procédés de contrepoint mais, sans mélodie, son âme, elle, est dénuée de vie et cela contribue à la déshumaniser.

En ce qui me concerne, la mélodie est une maîtresse envers laquelle je serai toujours fidèle. »MICHEL LEGRAND CINEMA2.indd 520/02/09 15:516En 1955, Michel Legrand s’est essayé à la pratique d’un autre mode d’expression lorsqu’il a écrit la musique du film Les Amants du Tage d’Henri Verneuil. Quatre années plus tard, avec l’avènement de la nouvelle Vague française, il est devenu l’un des architectes du renouveau du cinéma français en collaborant avec Jean-Luc Godard, Agnès Varda, François reichenbach et, bien sûr, Jacques demy, son alter ego créatif avec qui il a inventé un nouveau genre de film musical.

En plus d’avoir reçu la Palme d’or au Festival de Cannes et le Prix Louis-delluc, le film Les Parapluies de Cherbourg a rencontré un succès mondial en dépit des pronostics pessimistes des professionnels du cinéma. « Jacques et moi avons dû travailler très dur pour lancer ce projet, se rappelle-t-il, les producteurs nous ont montré la porte en disant : « vous êtes deux braves garçons, mais croyez-vous vraiment que les gens vont passer une heure et demie à écouter des personnages chanter les petites choses insignifiantes de la vie ! »

Ils redoutaient de financer un film où les chants remplaçaient le dialogue et qui avait un côté réaliste, qui rappelait trop la vie de tous les jours. Après une année incertaine, les choses ont commencé à bouger de nouveau grâce à Pierre Lazareff (qui nous a fait connaître Mag Bodard, un jeune producteur) et mon ami Francis Lemarque avec qui j’ai enregistré la musique. En d’autres termes, Les Parapluies de Cherbourg estune œuvre réalisée envers le jugement raisonné de tous ! »Chantée initialement par nana Mouskouri, la chanson de la séparation des amoureux (Je ne pourrai jamais vivre sans toi) est devenue un standard, largement redevableà l’adaptation de la version anglaise de norman Gimbel (I Will Wait for You) et aux versions de Frank Sinatra, Tony Bennett, Louis Armstrong, Liza Minelli, etc. Michel Legrand a continué à mettre en musique les paroles ingénieuses de Jacques demy (Les Demoiselles de Rochefort, Peau d’âne, Trois places pour le 26), bien qu’il se soit installé à Los Angeles en 1968 pour ce qu’il qualifie de « changement de scène ».Après le succès de L’affaire Thomas Crown et sa chanson Les Moulins de mon cœur(The Windmills of Your Mind), Michel Legrand a décidé de partager son temps entreParis et Hollywood, et travailler sur tout ce qui lui plaira : Un été 42, Lady Sings the Blues, Jamais plus jamais, Yentl, Prêt-à-porter, etc.

Considérant la musique de film comme une autre forme de dialogue, Michel Legrand est le seul compositeur européen dont la filmographie inclut les noms d’Orson Welles, Marcel Carné, Clint Eastwood, norman Jewison, Louis Malle, Andrzej Wajda, richard Lester, Claude Lelouch, pour ne citer qu’eux. néanmoins, ses récompenses prestigieuses dans le domaine de la musique pour le grand écran (trois Oscars) n’ont eu aucun impact sur sa créativité. « Un Oscar, précise-t-il avec conviction, est une médaille, une flatterie, le goût agréable du succès mais, en votre for intérieur, cela ne fait de vous ni un meilleur ni un pire compositeur, vos points forts et vos points faibles restes inchangés. Lorsque j’étais enfant, j’imaginais que j’avais un pot de graisse qui donnerait des pouvoirs surnaturels : si j’y trempais les doigts, j’aurais la technique d’un Horowitz.

Malheureusement, les statuettes d’Oscar ne sont pas trempées dans la graisse ! De toute façon, ce n’est pas ce qui compte : j’ai écrit toute cette musique pour et à cause du cinéma, sans les films, rien de tout cela n’existerait. »

En 1964, Michel Legrand décida d’interpréter ses chansons lui-même, ajoutant ainsi une autre corde à son arc. Sa voix, qu’il n’avait pas coutume d’utiliser dans ce contexte, devint un instrument supplémentaire. « Mon idée, reconnaît-il, était simplement d’essayer et de voir ce qu’il en était. Je l’ai fait aussi pour surmonter ma timidité. Après des années sur scène, dos au public, je me suis décidé à faire le contraire, à me tourner et faire face aux spectateurs. En fait, j’ai été séduit par l’idée après que Jacques Brel m’a demandé de faire la première partie de son spectacle à l’Olympia. J’ai été vraiment surpris, autant que Claude Nougaro a été surpris lorsque je l’ai encouragé à interpréter les chansons que nous avions écrites ensemble (Les Don Juan, Le cinéma). Ces choses démontrent comme nous sommes tous liés les uns aux autres, comme dans un engrenage.

Grâce aux encouragements de Jacques Brel, j’ai sauté le pas… » Michel Legrand a travaillé sa voix et s’est concentré en particulier sur la construction d’un répertoire avec deux auteurs de son choix : Eddy Marnay (Les Moulins de mon cœur,Quand on s’aime, Les Enfants qui pleurent) et Jean dréjac (Comme elle est longue à mourir ma jeunesse, Oum le dauphin, L’Été 42). Par la suite, il a eu l’opportunité de mettre en musique les paroles de Jean-Loup dabadie, Boris Bergman, Françoise Sagan et Jean Guidoni, et en 1981, il écrivit lui-même les paroles de son album Attendre… qu’il interpréta et composa également.

En Amérique, la fidélité de Michel Legrand envers Alan et Marilyn Bergman a donné naissance à de grandes musiques de films, généralement des thèmes musicaux (The Summer Knows, How Do You Keep the Music Playing?, The Way He Makes Me Feel).Après plus de quarante-cinq années consacrées à composer, Michel Legrand déborde de créativité comme jamais. Constamment à la recherche de nouvelles rencontres et collaborations, c’est un inventeur infatigable, refusant d’établir une hiérarchie entre les genres musicaux (« Pour moi, un beau tango vaut plus que certaines œuvres de Wagner… »).

Il considère que la composition est également un mode d’introspection original : « La manière de faire des progrès, déclare-t-il, consiste à être l’unique personne à pouvoir créer des choses auxquelles personne n’a pensé auparavant. C’est aussi une manière d’en savoir plus sur soi-même. Je veux avoir plus conscience de ce que je peux faire, même si cela implique d’aller trop loin. Je veux que mon bateau poursuive son voyage à travers les vagues, je dois expérimenter de nouvelles traversées et voir où elles me mènent.

Ceci dit, je suis extrêmement organisé sur le plan mental du fait de mon éducation classique. Je travaille souvent sur plusieurs projets simultanément. Je passe trois heures à composer la musique d’un film, je joue du piano pendant deux heures, je termine une chanson. En fait, chaque création est une version de la précédente création. Quand bien même, la musique reste un ensemble infini d’équations qu’il faut résoudre. Parfois, une idée vous vient en tête, vous pouvez la visualiser et vous pouvez déjà l’entendre.

Vous vous précipitez pour écrire la partition en imaginant a priori que ce sera simple et facile. Faux ! Nombre d’obstacles apparaissent tout à coup : la forme, le contenu, de petits détails, parce que si vous souhaitez être original, chaque mesure pose problème. »

Un autre trait caractéristique de la personnalité de Michel Legrand est qu’il rejette le concept de carrière : « Je déteste l’idée de buts, de résultats, de limites. Je suis un artiste, pas un homme politique. Je puise ma motivation dans la vie et dans la richesse et la diversité de tous types de musique. Sans oublier que ce qui est vraiment important c’est de rester un débutant. L’une des périodes les plus stimulantes de la vie correspond au moment où vous découvrez les choses, lorsque vous apprenez. Lorsque vous devenez trop compétent, votre spontanéité disparaît, vous ne craignez plus rien. J’espère ne jamais devenir quelqu’un que l’on décrit froidement comme étant « très professionnel ». Tout au long de ma vie, j’ai toujours voulu varier mes plaisirs musicaux et rester un éternel débutant, sans jamais rationaliser les choses en termes de « carrière ».

Stravinski avait déclaré une fois : « Nous autres insomniaques sommes toujours à la recherche d’un endroit frais sur l’oreiller ». Pendant des années, je n’ai eu de cesse que de rechercher cet endroit ! »Il est impossible de dire tout ce qu’il y a à dire sur Michel Legrand en quelques lignes, pour décrire son amour du jazz, ses bœufs avec Miles davis, Stan Getz, Phil Woods ou Stéphane Grappelli, ses rencontres avec les grands noms de la musique classique (Kiri Te Kanawa, Jessye norman, Maurice André) ou de la chanson populaire (Yves Montand, Barbra Streisand, Charles Aznavour), pour expliquer comment il est devenu producteur de films (Cinq jours en juin) ou comment il a créé l’histoire remarquable de Passe-muraille, un opéra bouffe écrit par didier Van Cauwelaert, à l’affiche aux Bouffes-Parisiens pendant un an, de 1997 à 1998.

En tous cas, même s’il doit encore avoir des projets magnifiques en stock, Michel Legrand a déjà réussi à réaliser un défi singulier, celui de vivre plusieurs vies en une seule.Plusieurs collections consacrées à Michel Legrand ont vu le jour au niveau international depuis les années 1980. Mais en 2001, Mercury et Universal ont finalement décidé d’éditer une anthologie officielle de l’œuvre de Michel Legrand, qui résume la carrière du chanteur-compositeur-musicien aux talents divers et variés. L’année qui précéda la sortie de cette anthologie, Michel Legrand reçut l’hommage d’une pléthore de vedettes interprétant ses standards lors d’un concert en plein air dans la cour du Louvre pour la Fête de la musique.

En 2003, il s’est vu remettre la Légion d’honneur.En 2005, Universal Jazz a édité Le Cinéma de Michel Legrand, un coffret avec les compilations des musiques de films les plus connues composées par Michel Legrand. Mais lui-même semblait réticent à se concentrer sur le passé et ne s’est pas impliqué dans la production de cette compilation de ses « meilleurs succès au cinéma ». Toutefois, le coffret de 4 Cd s’est avéré être un véritable trésor musical compilant 90 titres composés au cours des cinquante ans de carrière de Michel Legrand. En juin de la même année, Michel Legrand est retourné en studio. Cette fois-ci, il ne s’agissait pas de composer ses propres œuvres, mais de rendre hommage à son ami et collègue musicien, le chanteur toulousain Claude nougaro (décédé en 2004).

En collaboration avec des grands noms du jazz, et à l’aide d’enregistrements de la voix de nougaro, Michel Legrand a enregistré de nouvelles versions de nombreuses chansons moins connues du Petit Taureau, chansons qu’ils avaient écrites ensemble lorsde leurs nombreuses collaborations. L’album Legrand Nougaro, qui a la teneur d’une excentricité du jazz plutôt que d’une stricte affaire de chansons, inclut également des morceaux classiques de Claude nougaro retravaillés tels que Les Don Juan, Le Cinéma et Le Rouge et le Noir. Il comporte un bonus spécial, la nouvelle chanson Mon dernier concert, que nougaro avait écrite avant sa mort mais qu’il n’avait jamais enregistrée lui-même.

En 2008, la deuxième comédie musicale de Michel Legrand, Marguerite, un spectacle créé avec Alain Boublil et Claude-Michel Schönberg, s’est jouée à Londres au Theatre royal Haymarket. Marguerite se jouera également à Tokyo cette année. Une reprise du film Les Parapluies de Cherbourg aura lieu à Londres en 2009 et à Tokyo en 2010.

Michel Legrand et Mario Pelchat deviennent complices le temps d’un album et pour la première fois, un interprète, Mario Pelchat, consacrera un album entier aux plus grands succès du prolifique musicien. Le Québécois a choisi des chansons tirées du vaste répertoire de Legrand, puis est allé à sa rencontre en France. Les deux viennent tout juste de compléter l’enregistrement de l’album et un spectacle suivra à compter d’avril prochain.Couvert de récompenses musicales et de distinctions, primé par les Oscars, ce formidable talent n’a jamais laissé le succès lui monter à la tête ou assombrir son prodigieux appétit artistique.

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